Qui ne fut pas agréablement surpris en voyant cette notification YouTube ce mercredi 8 avril dernier ? Plutôt discret depuis la sortie de son dernier album Nuit en 2018, Jazzy Bazz revient en force avec son tout dernier freestyle, intitulé « Benny Blanco ».
Cela faisait quelques semaines que notre rappeur laissait sous-entendre qu’il préparait quelque chose. En effet, les curieux auront remarqué que quelque temps avant la sortie du freestyle, Jazzy Bazz avait fait un grand ménage sur son compte Instagram, laissant place à une toute nouvelle charte graphique à l’image de son clip. C’est donc ce mercredi 8 avril à 11 h que notre rappeur a signé son retour, les sourcils froncés plus que jamais :
Un retour en pleine lumière
Dans son dernier album, Jazzy Bazz livrait 12 titres conceptualisés autour des différentes heures nocturnes. Mais ici, c’est pour un retour en pleine lumière que l’ultra parisien opte. Textile blanc sur fond blanc, c’est avec prestance et charisme que Jazzy se tient devant la caméra de Dijor Smith. Un ami de longue date de l’artiste, à qui l’on doit notamment le très imagé « Cinq heures du matin » ou encore « Éternité » en feat avec Nekfeu, où les plans peuvent facilement être confondus avec ceux d’un film de science-fiction.
Le clip oscille entre cette esthétique épurée et des plans un peu plus rudes, montrant un rappeur brûlant comme jamais. La scène où il rappe face à son reflet dans le miroir, avec un regard tranchant, en donnerait presque des frissons. L’ambiance visuelle générale devient alors intimidante voir étrange…
2 minutes 17 de kickage intensif
Une multitude de punchlines et de références, des grosses basses et un découpage d’instrumentales déstabilisant, une technicité et un flow agressif, tels sont les ingrédients que Jazzy Bazz a décidé d’utiliser pour ce morceau. Un retour d’autant plus surprenant de par la direction musicale choisie.
En effet, l’instru réalisée par Johnny Ola & Lomi est aux antipodes des sonorités proposées sur Nuit, démontrant la polyvalence du membre de l’Entourage. Mais encore une fois, celui qui a fait son entrée dans le rap par la porte du boom bap 10 ans plus tôt prône de nouveau son amour pour les beats oscillants entre 85 et 92 BPM.
C’est donc dans une esthétique blanche digne d’une salle d’opération que le chirurgien Jazzy a décidé de saigner ses couplets :
« On est les vrais représentants de la langue française »
Difficile de le contredire lorsqu’on connaît la qualité de sa plume. Reconnu par la critique et le public comme un lyriciste de talent, Jazzy Bazz réaffirme une fois de plus son statut de fine lame dans « Benny Blanco ». D’ailleurs, ce titre est une référence directe au film de Brian de Palma intitulé « Carlito’s Way », où Benny Blanco est l’un des personnages du long-métrage.
Un son d’égotrip pur et dur, où notre rappeur prends un malin plaisir à aborder les thèmes qu’il affectionne comme l’envie de réussite, l’argent ou encore le luxe. Mais l’ultra parisien prend surtout le taureau par les cornes, et ce, dès les toutes premières lignes :
« J’suis l’amant d’Brigitte Macron, elle veut un vrai patron
Y aura plus d’mecs comme moi si tu limites l’immigration »
Des lyrics toujours plus sophistiqués
Décidément pas comme les autres, Jazzy Bazz se sent à part et dénonce cette vie superficielle, où tout le monde se ressemble et où les valeurs n’ont plus de valeur justement. Grâce à son talent, son élévation, et tout comme sa carrière, il est passé d’un vêtement discount italien à de la haute couture italienne. Punchline d’autant plus significative quand on réalise que notre rappeur fait référence ici à l’accoutrement porté par la Cosa Nostra, la mafia sicilienne, capable d’agir sur un appel téléphonique :
« J’suis c’que ma ville reflète, plus d’honneur, c’est le prix d’leur fame
J’brise leurs rêves, ils s’ressemblent tous comme les maillots du Pérou et d’River Plate
Toujours la même, ils ne prennent pas beaucoup d’risques, on veut tout tout d’suite
J’suis passé de Fabio Lucci à Gucci, j’peux débouler en moins d’deux sur un coup d’fil »
Ce ne sont pas les seules références à la mafia dans ce son :
« Organisé comme la yiddish, j’suis Meyer Lansky dans un Dickies »
Meyer Lansky est un mafieux d’origine polonaise et l’une des figures les plus marquantes du crime organisé dans les États-Unis au XXe siècle. Membre de la Yiddish Connection et du Syndicat National du Crime, il avait développé un business illégal par un réseau de casinos sur le sol américain. Dickies est quant à elle une marque texane de textile.
On a l’impression que Jazzy Bazz s’identifie en quelque sorte à ce genre d’organisation puisqu’il s’agit d’une grande puissance, mais qui reste en marge de la société, un peu comme lui. Et cette impression nous sera confirmée un peu plus tard :
« L’Etat Major est derrière la vitre sans tain, pour savoir c’que dit la loi, suffit d’l’enfreindre »
Enfin, le son se termine par un outro un peu plus calme où Jazzy Bazz souhaite se changer les idées, avec une femme, autre thème fétiche du rappeur parisien :
« Baby, faut qu’on se change les idées
J’aime quand tu me montres que tu le fais sans hésiter
F‑faut qu’on se change les idées
J’aime quand tu me montres que tu le fais sans hésiter »
Bientôt un nouvel album ?
La dernière fois que Jazzy Bazz était passé par la case YouTube, c’était pour « Hijo », un feat avec Almeria et Gros Mo. Aujourd’hui, c’est un retour en solitaire pour un morceau tout aussi particulier, « Benny Blanco », qui se dote d’un clip frappant… Une sortie nerveuse qui bousculera sans doute votre confinement. Quoiqu’il en soit, avec un premier clip comme amuse-bouche, on peut penser que Jazzy Bazz nous prépare la sortie d’un nouvel album dans les prochains mois. Le troisième après les sorties du magnifique P‑Town en 2016 et l’incroyable Nuit, en 2018.