Un cadeau de Noël signé Don Dada

Le 18 décem­bre, les oreilles de tout l’Hexa­gone ont été graciées par l’ar­rivée de la don dada mix­tape vol 1. Cette ogive nucléaire signée Alpha Wann arrive pile à temps pour ani­mer vos longs tra­jets en train pour rejoin­dre votre famille. Mais qu’ap­porte-donc cette sortie ? 

Depuis quelques années, Alpha Wann s’est imposé comme étant un pili­er du rap en France. Encore très sous-coté il y a quelques années, il s’est défini­tive­ment éman­cipé de son passé voilé par l’om­bre de son com­père Nek­feu. Cette mix­tape représente la preuve, le tam­pon, le sceau de qual­ité qu’ap­porte le nom d’Alpha Wann sur une track. Mais au-delà du fait que cet artiste signe cette sor­tie digne d’un clas­sique, qu’est-ce qui la démarque ?

Rappeur ou cracheur de feu ?

Dire qu’Alpha kick comme un dieu et que son écri­t­ure s’ap­par­ente à la plume d’Apol­li­naire serait répéter tout ce qui se dit depuis tou­jours. Mais une fois de plus, nous avons dans les mains un pro­jet qual­i­tatif de la part de l’artiste. Les rimes sont soignées, les com­para­isons claires et intel­li­gentes. Comme il le dit si bien :

 » Le phrasé est nice, le verbe est clean  » — ny à fond ft. Freeze Corleone

En somme, cette mix­tape pour­rait tout à fait être présen­tée par des lycéens au Bac. Dans les textes du rappeur, il y a assez de matériel pour men­er à bout une dis­ser­ta­tion, voire même un com­men­taire de texte. Rien qu’à voir les ana­lystes Rap Genius qui ont com­men­té les paroles de cette sor­tie comme on com­mente la Bible.

Avant d’a­vancer, voici quelques punch­lines pour illus­tr­er mes propos :

 » J’su­is tail­lé dans du bois d’ébène, ces rappeurs sont tail­lés dans du bois de Boulogne  » — apdl

 » J’ar­rive brûlant comme le pot d’unе Mit­subishi (vroom)
Ils n’ai­ment pas les étrangers (nan), sans lеs étrangers (nan), quoi, ils seraient encore en train de vivre sous Vichy  » ‑mit­subishi 

Et si le doute règne encore, l’an­tépénul­tième morceau : « car­relage ital­ien » pro­pose 3 min­utes de kick­age non stop où l’in­stru­men­tale min­i­mal­iste laisse briller le texte à sa juste valeur.

 » Ouais, j’su­is une pince, elle m’ap­pelle Jean-Michel Aulas, ouais j’su­is comme a‑ç, je f’rai pas d’gosse à une connasse
C’est l’dé­col­lage, effrite pas, mélange pas, pas d’col­lage, pas d’cool-al dans l’Co­la  » — car­relage italien

Une ques­tion se pose cepen­dant sur cette mix­tape : où sont les majuscules ?

Les invités à l’honneur

Neuf, c’est le nom­bre d’artistes dif­férents en fea­tur­ing sur cette mix­tape. Huit morceaux sur 17 pro­posent un fea­tur­ing soit la moitié des tracks. Au lieu de con­damn­er les invités au rôle de « bouche-trou », leur rôle est celui du faire val­oir. Le par­fait exem­ple serait celui de Freeze Cor­leone. Dans « ny à fond », les deux artistes se passent la balle comme à l’époque de l’al­bum En Sous Marin sor­ti en duo avec Nek­feu.

 » J’su­is dans la zone avec le Phaal (ekip)
J’su­is dans War­zone avec le FAL (pah pah)

Philly Flingo avec le Chen (avec le Chen)
Lunettes Carti­er avec le chêne (avec le chêne)  » — ny à fond ft. Freeze Corleone 

Par ailleurs, on note ici la sub­tile com­para­i­son que fait Freeze entre Alpha Wann et un fusil d’as­saut. Freeze fait aus­si une autre référence à son acolyte avec un clin d’œil à leur morceau en com­mun sur l’al­bum LMF : « Rap Catéchisme ».

 » Alpha Wann, Cor­leone, rap ecclési­as­tique  » — ny à fond ft. Freeze Corleone

D’autres artistes plus con­ven­tion­nels comme Nek­feu ou Deen Bur­bi­go sont présents sans grande sur­prise sur le pro­jet de leur ami. Mais d’autres col­lab­o­ra­tions plus saugrenues font leur appari­tion comme Kaaris ou  Kalash Crim­inel qui lâche tran­quille­ment le cou­plet le plus fémin­iste du rap français entre deux « Sauvagerie » :

 » T’as pas com­pris ? Agres­sion sex­uelle ne veut pas que dire péné­tra­tion (Let’s go)  » — pis­tons vs pac­ers ft. Kalash Criminel

Cette mix­tape pro­pose aus­si des titres entière­ment inter­prétés par des invités comme « malevil » par Nek­feu ou « super swish­style 2 » par K.S.A. Un con­cept rel­a­tive­ment nou­veau dans le genre où l’artiste laisse sa place et con­trôle depuis la voie des stands.

Kou2Keur

Qui dit album dit for­cé­ment coup de cœur et j’ai trou­vé le mien. Je ne suis pas un grand fan de Kaaris mais j’ai été agréable­ment sur­pris enten­dant sa voix sur une track. Ce qui mar­que ce morceau c’est le refrain. Il est sim­ple, dansant, effi­cace ; il donne l’im­pres­sion d’être dans une course pour­suite après un braquage dans un jeu vidéo.

 » Sol­dat tue sol­dat, meilleur pro­duit, j’su­is sold out (grr)
Les sous attirent les sous, le sang attire les loups
Nuage mag­ique, Son Goku, comme Barbe Blanche, je meurs debout (ok)
J’pense à l’esclavage quand ma chaîne Carti­er me pend au cou (ouais)  » — Kaaris

L’in­stru­men­tale prend d’ailleurs une tour­nure intéres­sante quand il par­le de sous. Le côté « bip­bip » élec­tron­ique serait peut-être un clin d’oeil à « Prends des pièces » des Casseurs Flow­teurs.

Est-ce le cas ? à vous de vous faire votre avis.

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